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ECONOMIE de la CHINE

Le développement des activités productives et leurs localisations ont largement dépendu des choix successifs effectués en matière de stratégie économique et d'orientation politique générale. Après une période de reconstruction et de mise en œuvre d'un modèle largement inspiré de l'exemple soviétique (1949-1958), la période du Grand Bond en avant voit l'accentuation de la collectivisation (avec, notamment, le développement des communes populaires) et des essais de diffusion de l'industrie dans l'ensemble du pays, en particulier dans les campagnes. L'échec constaté est suivi d'une période de retour en arrière, qui précède les essais de réforme radicale de la révolution culturelle. Après presque dix ans d'hésitations – marqués par des conflits entre les dirigeants et les décès de Mao Zedong et de Zhou Enlai en 1976 –, une nouvelle politique économique est inaugurée en 1979: décollectivisation agricole, décentralisation des décisions économiques, ouverture sur l'étranger. Le rythme de croissance, qui au début des années 1990 atteignait des rythmes records (14,2 % en 1992), a ensuite régulièrement baissé pour atteindre 7,1 % en 1999; après ce point bas, l'expansion semble de nouveau reprendre, sur un rythme légèrement supérieur à 8 %.
 
Agriculture
 
C'est sans doute là le problème majeur de l'agriculture chinoise, qui doit faire vivre 20 % de la population mondiale et employer 30 % de ses agriculteurs sur seulement 7 % des terres cultivées du globe. En dépit de l'immensité du territoire, les champs ne recouvrent en Chine que 120 à 140 millions d'hectares, soit moins de 15 % de la superficie du pays. Conséquence de l'extension des régions sèches et froides, cette situation atteste aussi la difficulté de mettre en valeur les moyennes montagnes et les plateaux, voire les collines des parties pluvieuses. On compte en moyenne 22 paysans pour 10 ha (proportion qui peut atteindre 30 dans le Sud). L'exploitation familiale moyenne est réduite à 0?66 ha.
 
Si un important effort a été consenti pour défricher les marges de la zone aride, comme la région du lœss ou le plateau mongol, les possibilités paraissent maintenant à peu près épuisées, tandis que l'extension des villes et des industries fait perdre de grandes superficies de terres agricoles. L'intensification des cultures est donc le moyen essentiel pour faire face à la croissance de la population et améliorer le niveau de vie.
 
Les paysans et la terre Peu après l'installation de la République populaire, les Chinois ont essayé d'obtenir une augmentation des rendements par la collectivisation. En 1952, la réforme agraire attribue la propriété du sol aux villages; à partir de 1953, le gouvernement organise les paysans en coopératives socialistes — elles seront 740?000 en 1958 — regroupant chacune environ 700 personnes. Ce mouvement culmine, lors du Grand Bond en avant, avec la fusion des coopératives en 24?000 communes populaires, qui regroupaient plusieurs milliers de personnes et se devaient d'atteindre un fort degré d'autosuffisance, selon le mot d'ordre «Compter sur ses propres forces». Cette politique a permis une croissance réelle de ce secteur, mais a maintenu le revenu agricole à des niveaux assez bas et n'a pu éviter des famines terribles, notamment en 1959 et en 1961, ce qui entraîna une réaction contre le gigantisme des communes populaires, que l'on commença à démultiplier. Puis, après la mort de Mao Zedong, pour lequel les communes populaires constituaient l'une des originalités majeures du communisme chinois, l'on procéda, par étapes, à une décollectivisation assez radicale. De grandes fermes d'État ont bien été conservées dans les régions pionnières, mais pour l'essentiel les terres ont été rendues aux familles paysannes, dans le cadre du «système de la responsabilité». Les exploitants disposent alors de leurs productions, moyennant le règlement d'un impôt foncier. Ils peuvent vendre eux-mêmes leurs produits; l'État leur en achète une partie à des prix fixes, offrant une garantie de revenus. Si les prix agricoles ont augmenté avec la libéralisation du commerce, l'avantage procuré aux paysans a été atténué par la hausse du prix des engrais et des machines. Les inégalités sociales semblent s'être considérablement accrues dans le monde rural, bien que la répartition des terres collectives se soit effectuée proportionnellement à la taille des familles.
 
Les systèmes de cultures
 
Dans chaque région, la combinaison des cultures dépend à la fois de facteurs naturels et des possibilités d'accès au marché. On distingue les cultures d'hiver, ensemencées à l'automne et récoltées au printemps, les cultures de printemps, semées en avril-mai et récoltées au début de l'été, et les cultures d'été, semées au début de cette saison et récoltées en automne.
 
Dans la partie orientale de la Chine, la répartition des systèmes de cultures dépend largement des températures. Dans le Sud, les hivers doux et les étés longs permettent deux cultures annuelles de riz; dans le Centre, le riz hivernal fait place au blé, tandis que plus au nord le riz disparaît, même en été. Le Nord-Est et les plateaux intérieurs sont le domaine du blé de printemps, la culture hivernale de cette céréale devenant impossible. L'irrigation permet une intensification des cultures; elle autorise les productions malgré les fluctuations des pluies et le remplacement des plantes adaptées à la sécheresse – comme les millets et le sorgho – par des cultures plus productives (riz, blé, canne à sucre, coton).
 
Les ressources de l'agriculture sont partout complétées par celles de l'élevage. Les «petits élevages» à la ferme (porcs, volailles) ont pris une grande importance. Un important effort a été consacré au développement de la production du gros bétail; la Chine des cultures produit actuellement davantage de viande que les élevages extensifs des zones sèches.
 
La pêche des poissons et des crustacés contribue aussi fortement à l'alimentation. La pêche en rivière joue un rôle très important, et a fait l'objet de développements remarquables, malgré les dégâts imputables à la pollution des eaux. Elle est de plus en plus complétée par l'aquaculture, activité de tradition très ancienne. Dans certaines régions méridionales, une ingénieuse association a été mise au point: les diguettes séparant les rizières sont plantées de mûriers; les déjections des vers à soie sont utilisées pour nourrir les poissons vivant dans les champs en eau; ces derniers sont en quelque sorte «récoltés» en même temps que le riz à la fin de la saison des pluies.
 
La pêche maritime est surtout côtière; elle se développe, mais son importance reste inférieure à celle pratiquée en eaux douces. La cuisine très savante des Chinois permet une valorisation de l'ensemble des ressources halieutiques qui, rassemblées, placent la Chine, au début des années 1990, au premier rang mondial, avec le Japon et la Russie.
 
Un bilan contrasté Depuis 1949, la production agricole a augmenté un peu plus vite que la population, malgré quelques années de catastrophes, dues autant aux erreurs d'orientation qu'aux caprices de la nature. Les progrès sont redevables au développement du contrôle des eaux et de l'irrigation, avec notamment les grands travaux réalisés dans la plaine de la Chine du Nord. Plus de la moitié des superficies cultivées sont irriguées au prix d'un énorme travail. Le second facteur d'intensification a été l'utilisation d'engrais chimiques; l'adoption de semences améliorées a pris du retard, et l'abondance de main-d?œuvre disponible a freiné la mécanisation. Si les tracteurs, et surtout les petits motoculteurs, sont maintenant répandus, ils restent plus utilisés pour le transport que pour les cultures.
 
Malgré les progrès, de graves difficultés demeurent. La productivité du travail reste peu élevée et beaucoup de paysans ne disposent que de faibles revenus. Les statistiques nationales font état de 25 % de «paysans pauvres», contre 38 % de familles aux revenus moyens, 30 % de paysans dits «aisés» et une petite minorité de «riches». Les inégalités sont très marquées entre les régions et ne coïncident que partiellement avec la répartition des systèmes de cultures: l'opposition est très nette entre les provinces côtières, surtout celles du Nord où les revenus sont élevés, et l'intérieur de la «Chine des cultures». Les oasis du Nord-Ouest fournissent aussi des revenus corrects aux agriculteurs.
 
Les possibilités d'amélioration des ressources agricoles étant limitées, les Chinois cherchent de plus en plus à développer d'autres activités dans les régions rurales (commerce, artisanat, petite industrie diffuse).
 
Ressources minérales et énergétiques L'immensité du territoire et l'importance des minéralisations dans le socle secondaire permettent à la Chine de disposer d'une vaste gamme de métaux non ferreux. Elle occupe une place importante à l'échelle mondiale pour le tungstène, l'antimoine et le molybdène, et produit aussi des quantités notables d'étain, de plomb, de bauxite et de cuivre. La plupart des gisements sont dispersés dans les collines du Sud. Les ressources en fer sont importantes et dispersées (on aurait recensé environ 600 gisements exploitables). La production est concentrée dans le Nord-Est (Mandchourie), en Mongolie, dans les provinces du Hubei, du Guizhou, du Yunnan et dans l'île de Hainan.
 
Avec 650 milliards de tonnes de réserves, la Chine est dotée de ressources considérables en houille. Le charbon est exploité dans des sillons du socle primaire, principalement situés dans le Nord et le Nord-Est. Les bassins les plus importants sont ceux de Fushun (Nord-Est), des Ordos (provinces du Shaanxi et du Shanxi) et de la vallée de la Wei. Les bassins du Sichuan et de Pingxiang, dans les collines du Sud, sont plus isolés.
 
Les ressources en pétrole, plus dispersées, plaçaient la Chine au sixième rang mondial des producteurs en 1995. On a en effet reconnu des réserves dans tous les bassins de subsidence, aussi bien dans l'Est (sillon mandchou avec le grand gisement de Daqing; région du golfe de Bohai, où l'on en exploite aussi bien sous les eaux que sur terre; bassin des Ordos et du Sichuan) que dans l'Ouest (bassins du Tsaidam, du Tarim, de Junggar ou de Dzoungarie). Des ressources sous-marines sont localisées au large des côtes méridionales. Si les réserves sont largement dispersées, la production reste plus importante dans le nord et le nord-est du pays.
 
La puissance des fleuves rend les possibilités d'aménagements hydroélectriques impressionnantes. Les centrales les plus importantes sont situées le long du Huanghe (Sanmenxia, par exemple), mais les potentialités sont plus grandes dans les montagnes pluvieuses du Sud-Ouest (cours supérieurs du Yangzijiang et du Zhujiang).
 
Si le charbon est présent dans des zones très peuplées et industrialisées, il n'en va pas de même pour les régions riches en pétrole ou exploitées pour leurs ressources hydroélectriques.
 
 
Industrie
Le régime communiste a, dès le début, cherché à doter la Chine d'une gamme complète d'industries, afin d'en asseoir l'indépendance économique. Ce choix est d'ailleurs assez logique pour un aussi grand pays. La progression de ce secteur, qui fournit une centaine de millions d'emplois, a été importante, puisque la part de l'industrie dans le revenu national est passée de 12 % en 1950 à 40 % [en 1994] (bâtiment compris). Cependant, en valeur, la production industrielle reste encore inférieure à celle des grandes puissances occidentales. La qualité des produits demeure, en outre, médiocre; beaucoup ont, par exemple, acquis la réputation de mal vieillir.
 
Le secteur étatisé regroupe une centaine de milliers d'usines employant plus de cent ouvriers. À côté du secteur d'État ont toujours existé des formes d'industries moins centralisées, gérées par des coopératives ou par les autorités provinciales et locales. La récente réforme économique a conduit au développement de ces dernières formes de propriété industrielle, et la gestion du secteur d'État a été profondément transformée: à des décisions centralisées et à des prix fixés à l'échelle nationale par le gouvernement, on a substitué un système qui laisse plus de responsabilités aux dirigeants des entreprises et qui fait jouer les mécanismes du marché dans la formation des prix. Si les Chinois ont renoncé à la généralisation de petites unités sidérurgiques dans les campagnes tentée avec le Grand Bond en avant, ils continuent d'essayer de développer l'industrie rurale, à l'initiative de petits entrepreneurs locaux individuels. Les investissements étrangers ont été encouragés, ceux des grandes compagnies multinationales comme ceux des «Chinois d'outre-mer», émigrants enrichis par leurs activités dans leurs pays d'accueil. La priorité longtemps accordée à l'industrie lourde devient moins exclusive, et la part des activités produisant des biens de consommation est devenue prépondérante.
 
Les variations d'implantation géographique rendent compte des différentes phases de cette politique industrielle. La Chine de 1949 a hérité d'un secteur industriel insuffisant, essentiellement installé dans quelques grandes villes de la côte et de la vallée du Yangzijiang, et par ailleurs ouvert aux étrangers installés dans des «concessions». Dans le Nord-Est, les Japonais, maîtres de la Mandchourie, avaient créé une importante base sidérurgique fondée sur les mines de fer et de charbon (notamment à Anshan). L'étape de la première industrialisation s'est traduite par un déplacement des industries vers l'intérieur du pays, avec pour triple objectif la mise en valeur des ressources minérales nouvellement exploitées, la réduction des inégalités régionales et la protection des usines, des attaques étant redoutées de la part des États-Unis, puis de l'URSS. Cette politique a eu pour effet de façonner de nouvelles régions industrielles, comme celle de Pékin-Tianjing (sidérurgie, textiles, mécanique, électronique), et une série de centres plus isolés, davantage situés dans le Nord et le long du Yangzijiang que dans le Sud. Ainsi sont apparues les spécificités industrielles de villes comme Xi?an (métallurgie, chimie), Lanzhou (chimie, textiles), Zhengzhou, Chengdu, Kunming. Dans l'Ouest, les gisements de pétrole n'ont pas donné naissance à une industrie importante, sauf à Urumqi (textile).
 
Depuis 1979, l'ouverture aux investissements étrangers a conduit à un «retour vers les côtes». La façade littorale a été équipée d'une série de «ports ouverts», tandis que se multipliaient des zones franches et des zones économiques spéciales (ZES) où une grande liberté est laissée aux compagnies étrangères et aux Chinois d'outre-mer de créer des usines de biens de consommation, exportés pour une large part. Ainsi s'est développée une longue chaîne de centres industriels (tous les 200 ou 300 km environ), et les vieilles villes manufacturières littorales, comme Shanghai, ont pu connaître un nouvel essor. Les nouvelles implantations les plus puissantes sont localisées dans le Sud, comme Shenzhen, qui profite de la proximité de Hongkong ou d'Amoy.
 
Cet «aller et retour» de l'industrie a entretenu un fort contraste entre les régions industrialisées du Nord-Est et celles de la côte orientale avec la Chine intérieure. Cette dernière conserve quelques centres notoires et surtout un grand nombre de petites unités dispersées, notamment dans les campagnes. Dans l'ensemble du pays, on compte près de 130?000 mines et carrières et 60?000 usines de transformation de produits alimentaires. Or beaucoup de ces unités s'avèrent trop petites pour être vraiment rentables. Enfin, la politique des autorités provinciales, qui désirent attirer des activités industrielles, conduit à des choix de localisation parfois peu rationnels du point de vue économique.
 
La libéralisation du commerce L'organisation de la distribution a longtemps été un point faible de l'économie chinoise, car les activités de commerce et de transport non directement productives étaient jugées secondaires. L'État a contrôlé jusqu'à plus de 90 % du commerce de détail, avec un réseau insuffisant de magasins d'État ou coopératifs dans les zones rurales.
 
 
 Le commerce se prêtant particulièrement mal à la gestion centralisée, il n'est pas étonnant que le gouvernement ait renoncé à son contrôle dès le début de la période de réforme économique. L'initiative privée a donc été préservée dans ce domaine plus que dans tout autre; les petites boutiques, les vendeurs de rue et les marchés ruraux sont réapparus massivement, suscitant de nombreuses créations d'emploi. Cependant, ce phénomène est plus marqué dans les régions rurales que dans les villes. Les Chinois ont cherché, parallèlement, à développer un réseau bancaire moderne pour assurer le financement de ce nouveau secteur privé.
 
L'évolution du commerce international reflète celle de l'ensemble de l'économie. Les exportations de produits agricoles (thé, coton, soja) sont passées de plus de 50 % en 1950 à moins de 15 % au début des années 1990. Elles ont d?abord été relayées, à partir des années 1960, par celles des produits de l'industrie légère et, beaucoup plus récemment, par celles des produits de l'industrie lourde. De même, la structure des importations a d?abord traduit les besoins de la Chine en biens d'équipement avant d'exprimer ses besoins en matières premières. Les importations de biens de consommation ont toujours été limitées; elles représentent moins de 20 % des achats extérieurs depuis 1970.
 
Les transports Non prioritaire au début du régime populaire, le secteur des transports a pris du retard. Les politiques d'autarcie provinciale ont, en outre, contribué à sous-estimer des besoins qui apparaissent cependant de plus en plus nettement, pour assurer la cohésion de l'espace national et transférer les matières premières de l'intérieur vers les régions côtières, où se développe désormais l'industrie.
 
Les routes assurent surtout une circulation diffuse à courte distance. On en recense pratiquement 1 million de kilomètres, mais souvent en mauvais état: seuls 30?000 km de routes (environ 3 %), de première catégorie, assurent des conditions de circulation acceptables pour les cars, les camions et les charrettes tirées par des motoculteurs.
 
Les chemins de fer jouent donc un rôle essentiel pour les transports à longue distance. Les 65?750 km de lignes constituent toutefois un équipement faible pour un pays aussi vaste. Plus de la moitié du réseau est postérieur à 1950. Son développement vise notamment à désenclaver le Sichuan (voie Xi?an-Chengdu-Kunming) et à ouvrir l'Ouest (liaison Lanzhou-Urumqi). La modernisation (électrification, passage à deux voies) a amélioré les grandes relations méridiennes entre les provinces côtières (axe Pékin-Shanghai) ou plus intérieures (axe direct Pékin-Canton), ainsi que trois relations est-ouest entre les côtes maritimes et les grands gisements miniers (le charbon représente la moitié du fret ferroviaire).
 
La voie fluviale permet de transporter presque autant de marchandises que le chemin de fer. L'artère majeure est le Yangzijiang, que des bateaux de 10?000 t peuvent remonter jusqu'à Wuhan. Si les fleuves assurent surtout des relations est-ouest, les Chinois ont recreusé et remis en service le très ancien Grand Canal qui relie la vallée du Yangzijiang à la région de Pékin.
 
La volonté de promouvoir le tourisme et de permettre les déplacements des cadres a conduit à un développement des liaisons aériennes; celles-ci desservent quatre-vingt-dix villes avec une flotte importante, mais qui reste hétérogène et parfois même précaire. Seuls les aéroports de Pékin et de Shanghai disposent d'équipements modernes.
 
Les ports maritimes assurent un important trafic international et un cabotage actif. Shanghai a une position nettement dominante dans ce domaine.
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