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ECONOMIE de la COREE DU SUD

ECONOMIE de la COREE DU SUD

 Le décollage spectaculaire de l'économie, son taux de croissance soutenu (9 % en moyenne de 1955 à 1990) reposent sur une importante aide américaine au départ, une main-d'œuvre abondante, la pratique de salaires peu élevés. Le rôle de l'État est lui aussi décisif: la planification coréenne est la plus stricte de tous les pays non socialistes. La grande industrie a démarré avec la création d'entreprises publiques (Pohang Steel Corp., Korean Oil Corp.), dont Séoul fixe les orientations, les objectifs et détermine les secteurs prioritaires. La Banque de Corée garde la haute main sur les prêts et allocations accordés à ce secteur.

Depuis 1962, c'est la promotion des exportations qui a guidé l'industrialisation et poussé à la concentration dans les complexes manufacturiers, tels Pohang, Kwangju et Ulsan. La pratique systématique de l'emprunt devait toutefois entraîner un fort endettement; aussi le régime sud-coréen a-t-il décidé d'attirer les entreprises étrangères sous la forme de co-entreprises (à 80 % américaines et japonaises) accompagnées de transferts de technologie. Deux zones franches (Masan et Iri) ont été créées.

Cette industrialisation rapide a permis de freiner le taux de chômage, qui dépasse 2 %. Plus de la moitié de la main-d'œuvre travaille dans les petites et moyennes entreprises (employant de 5 à 500 employés), qui constituent 96 % des établissements industriels et commerciaux. Mais les conglomérats dominent l'économie: une cinquantaine de grands groupes – dont neuf trusts géants – employaient 42 % de la main-d'œuvre en 1990 et fabriquaient 70 % des produits manufacturés.

Comme à Taiwan, à Singapour et à Hongkong, et en partie au Japon, la mobilisation de l'orgueil national, la réapparition des vieilles fidélités de type confucéen (vis-à-vis de la firme qui vous emploie), la propagande constante de l'État, l'accent mis sur les exportations et la volonté d'être à la pointe de la technique caractérisent, et expliquent, la remarquable croissance sud-coréenne.

Une industrie de pointe Ce n'est qu'en 1976 que la part de l'industrie de transformation a dépassé celle du secteur primaire dans le revenu national. La pêche s'est étendue à l'océan mondial et l'aquaculture se développe rapidement. Le pays est autosuffisant en riz et détient l'un des plus gros rendements en grains. L'essor de l'élevage répond à une demande accrue de protéines animales. Le manque de terres est le problème le plus aigu; comme au Nord, on s'efforce d'en conquérir de nouvelles, aux dépens de la mer, et d'étendre les périmètres irrigués.

L'industrie s'est développée sur trois périodes. Jusqu'en 1970 dominent le textile, les produits alimentaires, le ciment, les engrais chimiques et les produits dérivés du pétrole. À compter du troisième plan (1970) se développe une seconde série d'industries lourdes, situées en amont des premières: pétrochimie, aciéries, constructions navales et automobiles. Les conglomérats (chaebols) prennent alors leur essor: Hyundai (qui produit le dixième des richesses nationales), Daewoo, Samsung, Ksec, Posco, Ulsan, Yeochon. À partir de 1980, un troisième étage s'ajoute à l'édifice industriel: les produits à haute technologie. L'industrie électronique ne se contente plus d'assembler les composants japonais: elle les fabrique. La recherche s'étend aux semi-conducteurs et aux biotechnologies. Samsung et Hyundai possèdent des filiales dans la Silicon Valley (Californie). Les technologies américaine et japonaise sont parfois acquises à grands frais. Dans le cadre d'accords fructueux signés avec de grandes firmes nippones ou nord-américaines, la Corée du Sud vend de plus en plus d'automobiles (par exemple Hyundai au Canada) et de matériel musical.

Nouveau pays industrialisé, la République de Corée concurrence désormais le Japon sur de nombreux marchés; il a toutefois fallu attendre 1980 pour que les résultats du commerce extérieur dépassent ceux du marché national. La nature des produits vendus a suivi les stades de l'industrialisation, passant des textiles à l'acier et aux machines et, de plus en plus, aux produits sophistiqués faisant appel aux composants électroniques. Les deux tiers des importations sont consacrés au pétrole. Aux partenaires du début – États-Unis (le quart des importations, le tiers des exportations); Japon (28 % des importations et 21 % des exportations) – sont venus s'ajouter d'autres pays asiatiques, l'Europe, et même la Chine depuis les accords conclus avec Pékin au début des années 1990.

Des contraintes cependant La remarquable croissance sud-coréenne repose sur des préalables dont certains ne sauraient durer. Parmi les quatre problèmes cruciaux qui se posent au pays à la fin du millénaire, la pratique des bas salaires – qui a permis un démarrage rapide de l'économie et fourni un avantage face au Japon – est certainement le plus sensible au niveau social. C'est justement en réponse à de violentes grèves que la rémunération des travailleurs de l'industrie s'élève régulièrement et que disparaissent les inégalités entre les personnels masculin et féminin. Les prix des biens d'usage diminuant, le niveau de vie a tendance à augmenter: en 1980, le prix d'une automobile Hyundai représentait l'équivalent du revenu moyen annuel d'une famille, contre huit mois de ce même revenu sept ans plus tard. Malgré de remarquables résultats sur le plan économique et le maintien d'une croissance soutenue (de 1981 à 1989, le PNB a été multiplié par trois), la Corée du Sud, qui a dû revoir à la hausse sa politique salariale, n'échappe désormais plus au spectre de l'inflation (9,5?%) [1997].

Le rôle prépondérant de l'État a été servi par un autoritarisme accepté seulement au nom de la rivalité avec le Nord, mais cet état d'esprit est en déclin. La rigidité de la législation du travail, les nombreux accidents professionnels, l'inégalité croissante des revenus, les nuisances mal contrôlées sont autant de thèmes récupérés par l'opposition politique. Comme au Japon, la richesse globale du pays n'entraîne pas forcément celle de tous ses habitants.

La dette extérieure a pu paraître «saine» tant que la croissance permettait de la maintenir au niveau du quart du PNB. Depuis 1980, ce pourcentage s'élève, alors que la crise pétrolière avait déjà entraîné une ponction supplémentaire sur le budget. L'État a réagi en suscitant la mise sur pied d'un système bancaire plus libre.

Le succès foudroyant des exportations – certains produits (voitures, instruments de musique) sont moins chers que leurs équivalents japonais – a suscité des réserves croissantes de la part des nations industrielles, qui accusent les Sud-Coréens de favoriser chez elles le chômage. Mais le régime de Séoul a su réagir en s'intéressant aux pays en voie de développement (Afrique, Moyen-Orient), demandeurs d'usines clé en main et de grands travaux (routes, barrages).