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L'HISTOIRE de l'IRAN

Malgré les invasions grecque, arabe, turques, mongoles et l'influence culturelle occidentale, les civilisations de l'Iran ont réussi à protéger leur identité, dans le cadre d'un État qui a su conserver son autonomie depuis plus de vingt-cinq siècles. 
 
Des Elamites aux Sassanides La civilisation des Élamites, contemporaine de celles de Sumer et des Assyriens, fut l'une des plus brillantes du territoire actuel de l'Iran (écriture cunéiforme, bronzes du Luristan) avant l'arrivée des premières tribus aryennes à la fin du IIe millénaire av. J-C Les Mèdes établirent leur royaume dans le nord du Zagros (Ecbatane), et les Perses, avec la dynastie des Achéménides, s'établirent plus au sud, autour de Suse. Cyrus le Grand s'empara du royaume mède en 550 av. J-C et construisit l'empire alors le plus vaste et le plus puissant, de l'Asie Mineure grecque à la Bactriane, après avoir pris Babylone en 539 et délivré les Juifs, dont un grand nombre s'installèrent en Perse. Les Rois des Rois, dont la religion était le zoroastrisme, eurent pour capitales Suse, Pasargades, Persépolis, Ecbatane et Sardes. L'apogée de l'Empire achéménide fut atteint sous le règne de Darios le Grand (522-486 av. J-C). Malgré la prise et l'incendie de Persépolis (330 av. J-C) puis la conquête de la Perse par Alexandre le Grand, les souverains grecs Séleucides protégèrent la civilisation de la région en cherchant une synthèse entre les cultures perse et hellénique. La dynastie des Parthes (ou Arsacides), venue de l'est, prit le pouvoir en 247 av. J-C, et se posa en restauratrice de la civilisation achéménide. Son autorité, avec des rois comme Mithridate Ier, s'exerça pendant presque cinq siècles entre l'Arménie et la Bactriane. C'est cependant sous les rois (les chahs) sassanides (224-641 apr. J-C) que l'Iran connut un nouvel apogée et vit le renforcement de la culture et du nationalisme iranien ; cet empire, qui s'étendit de la Mésopotamie à l'Indus, se heurta à l'Empire romain, à Byzance et aux Huns. Dans cet État puissant et bien administré, dont la capitale était Ctésiphon, en Mésopotamie, il y avait depuis longtemps de nombreux chrétiens nestoriens, mais le pouvoir était aux mains d'un clergé zoroastrien, coupé de la population, ce qui contribua à sa perte quand commença la conquête arabe. 
 
Des califats omeyyade et abbasside aux invasions mongoles 
 
Les armées sassanides furent défaites à Nehavend en 642, mais les provinces persanes du nouvel empire gardèrent toujours leur identité, voire une certaine autonomie. La Perse fut dès lors intégrée dans les califats omeyyade et abbasside, qui utilisèrent massivement les fonctionnaires de l'Empire sassanide. En 945, la dynastie chiite iranienne des Bouwayhides s'empara de Bagdad, mais elle fut renversée par des envahisseurs, les nomades turcs seldjoukides, sunnites, qui étaient déjà nombreux dans les armées du califat abbasside et qui prirent Bagdad en 1055 : depuis lors, l'histoire de la Perse fut dominée par la présence de soldats, de nomades, d'administrateurs turcs, que l'on distingue jusqu'à nos jours des Persans, des Fars. Les Mongols de Gengis Khan envahirent la Perse en 1219, puis la dominèrent à partir de 1256, lorsque tomba la forteresse d'Alamut, dernier refuge de la secte des Assassins. Les massacres systématiques et les dévastations opérées par les Mongols ruinèrent pour plusieurs siècles la civilisation persane citadine et villageoise : le nomadisme se développa, accentuant l'opposition entre les Turcs et les Tadjiks, c?est-à-dire les Persans. Ce fut seulement en 1295 que Ghazan Khan, souverain ilkhanide descendant de Gengis Khan, se convertit à l'islam, en fit à nouveau la religion officielle et restaura l'autorité de l'État. La dernière invasion turco-mongole qui ravagea la Perse fut celle des tribus de Tamerlan, entre 1381 et 1404. Malgré le chaos politique, les souverains Timurides entreprirent alors de restaurer le pays en favorisant le commerce et la vie intellectuelle et citadine. 
 
La dynastie Séfévide 
En 1501, un groupe de tribus turcomanes chiites, les Kizil Bash («Têtes rouges»), prit Tabriz ; leur chef, Ismaïl, se fit couronner chah et imposa partout en Iran l'islam chiite. Ce fut le début de la dynastie Séfévide et la renaissance d'un État iranien réellement autonome. Sous Chah Abbas (1588-1629), Ispahan, la «Moitié du monde», devint capitale. Avec la sécurité, la prospérité revint, des caravansérails furent construits le long des nouvelles routes, de splendides mosquées et des palais furent bâtis dans toutes les villes ; le prestige et la prospérité du royaume attirèrent les commerçants et les ambassades étrangères. Cette période, l'une des plus brillantes de l'histoire et de la civilisation persanes, s'acheva dramatiquement en 1722 quand les Afghans prirent et pillèrent Ispahan. Le chef d'une tribu turque du Khorasan chassa l'envahisseur et prit le pouvoir en 1736 sous le nom de Nadir Chah. Après avoir pris et pillé Delhi en 1739 – et rapporté en Perse un trésor, dont le célèbre trône du paon du Grand Moghol –, il fit transférer sa capitale à Mechhed. À sa mort en 1747, Karim Khan, le chef de la tribu Zend, prit le contrôle du pays ; il ne prit pas le titre de chah, mais celui de vakil (lieutenant) et, jusqu'à sa mort en 1779, assura quelques décennies de paix à partir de Chiraz, sa capitale. 
 
Les Qadjars La tribu turcomane des Qadjars parvint alors au pouvoir après une nouvelle guerre civile : Agha Mohammad Khan fit de la petite ville de Téhéran sa capitale en 1786 et s'y fit couronner. La dynastie des Qadjars gouvernera l'Iran jusqu'en 1925. Le règne de Fath Ali Chah (1797-1834) fut marqué par le début de l'influence directe des grandes puissances en Perse. Après l'échec d'une alliance avec Napoléon en 1807, et deux guerres contre le tsar, les Qadjars perdirent, au profit de la Russie, les provinces du Caucase et du nord de l'Araxe (traité de Tourkmantchaï, 1828). La Grande-Bretagne, pour qui la Perse était avant tout une marche de son empire des Indes, battit les armées de Mohammad Chah (1834-1858) et imposa en 1856, au traité de Paris, la reconnaissance par l'Iran de l'Afghanistan et la perte de la province de Harat. Le long règne de Nasir al-Din Chah (1848-1896) inaugura la modernisation du pays, avec la création en 1848, par le ministre réformateur Amir Kabir, de la première école scientifique (Dar al-Fonun), les voyages du souverain en Europe, et la réorganisation de l'administration et du commerce confiée à des monopoles étrangers, dont le plus puissant était celui du baron Reuter. Cette politique suscita de violentes oppositions dans le clergé et dans la nouvelle bourgeoisie influencée par les idées libérales occidentales (révolte des Tabacs, 1891). Une révolution secoua la Perse en 1906 et imposa à Muzaffar al-Din Chah (1896-1907) une Constitution et un Parlement. En 1907, Russes et Britanniques partagèrent la Perse en deux zones d'influence et intervinrent directement dans ses affaires intérieures ; le Parlement fut suspendu en 1909, et Ahmad Chah, âgé de onze ans, remplaça son père Mohammad Ali. 
 
L'Iran moderne La Première Guerre mondiale accentua le chaos : de 1915 à 1921, le mouvement révolutionnaire des Djangalis contrôla la province du Gilan et reçut pendant quelque temps le soutien des bolcheviks russes, qui signèrent pourtant un traité avec l'Iran, permettant au nouvel homme fort du pays, le colonel Riza Khan, qui venait de prendre le pouvoir à Téhéran (21 février 1921), d'écraser la rébellion. 
 
Soutenu par les Britanniques qui craignaient l'influence communiste dans un pays en proie au désordre, Riza Khan se fit proclamer chah en 1925, et fut couronné le 25 avril 1926 sous le nom de Pahlavi, qui est celui de la langue de l'Iran ancien. Il entreprit sur le modèle d'Atatürk, avec énergie et souvent brutalité, la modernisation du pays, dans un esprit nationaliste. Il créa de véritables ministères et une administration avec l'aide de conseillers américains, l'université de Téhéran (1935), une armée nationale et non plus tribale. Pour casser les systèmes sociaux en place, il lutta contre le clergé et les chefs de tribus, interdit le port du voile pour les femmes. Pour permettre l'industrialisation du pays, désormais appelé officiellement Iran, Riza Chah ordonna la construction de routes et de chemins de fer (Transiranien de la Caspienne au golfe Persique en 1938), développa les relations avec l'extérieur mais abolit (1928) les monopoles étrangers. Le pétrole, dont l'Iran était le plus ancien et le principal producteur du Moyen-Orient, apportait au pays des revenus croissants, mais ce secteur échappait au gouvernement qui ne percevait que des redevances octroyées par la toute-puissante Anglo-Iranian Oil Company, devenue propriété de l'Amirauté britannique. Pour échapper aux tutelles traditionnelles, l'Iran se rapprocha alors de l'Allemagne : celle-ci prit une influence grandissante dans l'économie, et assurait 45 % du commerce iranien en 1940. Craignant pour son approvisionnement en pétrole et pour l'empire des Indes, la Grande-Bretagne décida, avec l'URSS, d'envahir l'Iran et contraignit Riza Chah à abdiquer au profit de son fils Mohammad Riza, le 25 août 1941. Durant la Seconde Guerre mondiale, les Alliés passèrent par l'Iran pour ravitailler le front russe, puis contribuèrent à éliminer, en 1946, les deux éphémères Républiques socialistes du Kurdistan et d'Azerbaïdjan, créées par des militants nationalistes et le parti communiste Tudeh. La réaction populaire à ces interventions étrangères porta au pouvoir, en 1951, Mossadegh, leader du Front national, parti libéral et nationaliste. Allié aux communistes et avec l'appui des religieux conduits par l'ayatollah Kashani, il nationalisa l'Anglo-Iranian Oil Company qui, en représailles, cessa immédiatement toute production, ajoutant une crise économique aux troubles politiques. Avec l'aide des Britanniques, les États-Unis organisèrent, le 23 août 1953, un coup d'État dirigé par le général Zahedi : celui-ci rendit le pouvoir à Mohammad Riza Chah, qui s'était exilé mais qui reprit progressivement en main la situation politique : intégration de l'Iran dans le pacte militaire de Bagdad (Cento) en 1955, création de l'Organisation de la sécurité nationale (Savak) en 1957, signature d'un accord militaire (1962) avec les États-Unis, qui joueront désormais un rôle central dans le pays et ne seront pas étrangers au lancement de la politique de développement économique et social mise en œuvre en 1963. La «révolution blanche du chah et du peuple», dont la clé de voûte fut la réforme agraire, accéléra, sous la direction du Premier ministre Amir Abbas Hoveyda, l'expansion économique dans un climat de despotisme politique. Encore renforcé par l'augmentation du prix du pétrole en 1973, ce bouleversement industriel provoqua une crise sociale et culturelle dans la jeunesse libérale des grandes villes, chez les ouvriers d'obédience communiste, et surtout dans le clergé, qui prendra vite la tête de l'opposition. L'alliance paradoxale des intellectuels libéraux proches du Front national, des partis de gauche, des mollahs, et finalement de l'armée, permit le développement d'un mouvement révolutionnaire populaire qui débuta en janvier 1978, après la répression sanglante d'une manifestation à Qom, et aboutit, le 11 février 1979, au renversement du chah (qui mourut au Caire le 27 juillet 1980) et au retour du chef spirituel de la communauté chiite, l'imam Khomeyni, exilé depuis quinze ans. 
 
La république islamique d'Iran 
 
Chronologie (1980) La nouvelle république islamique d'Iran, instaurée le 1er avril 1979 et largement dominée par la personnalité de son fondateur, concentra le pouvoir dans les mains d'une nouvelle classe politique dirigée par le seul clergé, qui fit exécuter les principaux représentants de l'ancien régime, imposa une stricte morale islamique, organisa la répression contre tous les opposants et pratiqua une politique résolument anti-occidentale. Abol Hassan Bani Sadr, élu président de la République en janvier 1980, fut déposé en juin 1981 sous la pression des religieux extrémistes, ce qui entraîna une guerre civile larvée (assassinat du nouveau président Mohammad Ali Radjai, élimination physique des opposants comme les Moudjahidin du peuple et les militants du parti communiste Tudeh). L'Iran se trouva vite isolé du fait de sa politique farouchement anti-américaine (prise en otages des diplomates américains pendant 444 jours) et de son activisme islamiste (intervention militaire au Liban), et dut contrer, à partir de septembre 1980, l'invasion de la province pétrolière du Khuzistan par l'armée irakienne. Ce conflit très meurtrier, qui ne devait prendre fin qu'en juillet 1988, perturba gravement la production de pétrole et aggrava la profonde crise économique et culturelle qui accéléra l'exode de nombreux cadres et intellectuels. Après la mort de l'imam Khomeyni, en juin 1989, le gouvernement adopta une politique plus pragmatique pour entreprendre la reconstruction du pays (désislamisation du système bancaire, lutte contre la corruption) sous la direction du nouveau président de la République, Akbar Hachemi Rafsandjani, et du nouveau «Guide suprême de la Révolution», Ali Khamenei. La guerre du Golfe, en 1991, permit à l'Iran de récupérer les territoires occupés par l'Iraq, tandis que se développait une nouvelle politique d'ouverture à l'Occident et vers la Turquie et l'Arabie Saoudite. Mais les États-Unis accusent toujours l'Iran d'animer le terrorisme international, et le président Clinton a signé, en août 1996, une loi pénalisant les entreprises qui investissent dans ce pays. 
 
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