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L'HISTOIRE d'ISRAEL

La terre d'Israël est considérée comme le berceau du peuple juif, dont l'histoire antique fut marquée par l'alternance de périodes de souveraineté et de dominations extérieures et d'exodes, jusqu'à sa dispersion finale (diaspora) à la suite de la conquête romaine. Après des siècles de disparition, l'histoire moderne d'Israël recommença dans les années 1880, avec les débuts de l'immigration sioniste qui allait façonner une nouvelle identité du pays et aboutir à la proclamation de l'État hébreu, en 1948. 
 
Cette nouvelle histoire reste toutefois marquée, jusqu'à nos jours, par la persistance de rapports conflictuels entre Israël et ses voisins arabes et palestiniens. 
 
La première immigration sioniste 
 
Le milieu du XIXe siècle vit l'intrusion de plus en plus pressante des nations européennes dans l'Empire ottoman déclinant. En Palestine, outre par la modernisation des communications, cette présence se manifesta sous deux formes: des missions d'études bibliques et archéologiques et, à partir des années 1881-1882, l'arrivée de plus en plus nombreuse d'immigrants juifs d'Europe. 
 
Chassés de Russie et d'Europe orientale par les pogroms et les persécutions, et fuyant l'Europe occidentale où se manifestaient à nouveau des formes de discriminations antisémites (affaire Dreyfus en France), ces immigrants juifs s'installèrent dans une Palestine alors province de l'Empire ottoman et y fondèrent des colonies agricoles avec l'objectif de donner aux juifs une patrie. Cette ambition les distinguait nettement des quelque 25.000 juifs religieux déjà présents depuis des siècles sur cette terre (à côté de 450.000 Arabes palestiniens), où ils s'y consacraient essentiellement à la prière et à l'étude des textes sacrés. 
 
L'arrivée de ces immigrants marqua le début du sionisme, un mouvement qui devait prendre un essor nouveau à la charnière des XIXe et XXe siècles sous une double impulsion. D'abord l'action d'un homme, Theodor Herzl, qui lança le sionisme politique en le dotant d'un manifeste (L'État des juifs, 1896) et d'une structure, l'Organisation sioniste mondiale (1897), chargée de défendre sur la scène internationale l'objectif de création d'un État pour le peuple juif. Ensuite, la consolidation d'une réalité sioniste en Palestine grâce à une deuxième vague d'immigration (1904-1914). 
 
Ce sionisme politique, aspiration au retour des Juifs en terre d'Israël, allait en effet se manifester par plusieurs vagues d'immigration successives, dites aliyah («montées»), qui commencèrent dès 1878 avec la fondation de Petah Tikvah, première communauté agricole juive en Palestine. Ce mouvement, qui s'amplifia à la fin du XIXe siècle à mesure que se multipliaient les pogroms en Russie et en Ukraine, se heurta bientôt à l'hostilité de l'administration ottomane. Après la création de l'Organisation sioniste mondiale par Theodor Herzl, au congrès de Bâle en 1897, et l'échec de la révolution en Russie en 1905, les immigrants de la seconde aliyah, fortement inspirés par l'idéologie socialiste, créérent les premiers kibboutzim sur des terres achetées par le Fonds national juif. En 1914, 85?000 Juifs étaient installés en Palestine. 
 
Forte d'environ 40.000 personnes, cette immigration qui se réclamait des idéaux du socialisme jeta les bases de la société israélienne : mise en place d'exploitations coopératives (kibboutz, mochav); partis politiques; organisations paramilitaires d'autodéfense, etc. 
 
Ces institutions furent consolidées après la Première Guerre mondiale : création d'une Agence juive, fonctionnant comme un quasi-gouvernement, et d'une assemblée législative représentant les juifs de Palestine; formation d'une véritable armée clandestine; constitution d'un super-syndicat, la Histadrout, qui intervenait dans une infinité de domaines (économie, santé, éducation...). Le Yichouv (communauté juive de Palestine) connut une croissance démographique notable puisque la population juive passa de 56.000 en 1918 à 400.000 en 1936 
La Palestine sous mandat britannique 
 
Ces transformations furent facilitées par le changement de statut de la Palestine qui, à compter de 1922, fut officiellement placée sous administration britannique. 
 
Au cours de la Première Guerre mondiale, les Britanniques s'étaient efforcés avec succès de libérer le Proche-Orient de la tutelle ottomane. En décembre 1917, le général Allenby entra à Jérusalem à la tête d'une unité comprenant trois bataillons de la Légion juive. En juillet 1922, la Société des Nations confia un mandat à la Grande-Bretagne sur l'ensemble de la Palestine (la Transjordanie, attribuée à l'émir hachémite Abdallah, en fut peu après détachée). 
 
Selon les termes du mandat qui lui avait été donné par la SDN, la Grande-Bretagne était tenue de travailler à la mise en œuvre de la déclaration Balfour du 2 novembre 1917 par laquelle elle manifestait son engagement à favoriser l'établissement d'un foyer national juif en Palestine. Dès lors, au-delà de leurs liens historiques et spirituels avec cette terre, les juifs appuieront dès lors la revendication de leurs droits sur la Palestine sur le fait que, par deux fois, ces droits auront été reconnus par la communauté internationale : une première fois en 1917 par la déclaration Balfour, et une seconde en 1922, par la Société des Nations lorsque celle-ci désigna expressément comme une des tâches de la Grande-Bretagne, investie d'un mandat sur la Palestine, d'y «assurer l'établissement d'un foyer national pour le peuple juif» (sans toutefois avoir défini précisément un territoire). 
 
L'immigration juive se poursuivit donc avec la troisième puis la quatrième aliyah (1919-1923 et 1924-1930). La cinquième aliyah (1933-1939), déclenchée par l'arrivée des nazis au pouvoir en Allemagne, porta l'effectif de la communauté juive de Palestine à 400.000 personnes en 1936. 
 
Cependant, la déclaration Balfour avait été fermement rejetée par les Arabes (90 % de la population de la Palestine en 1922) et la période 1922-1940 fut marquée par de nombreux heurts opposant la population arabe aux colons et immigrants juifs, et une série d'émeutes anti-juives que la puissance mandataire, empêtrée dans des promesses contradictoires, se montra incapable d'apaiser, et qui s'acheva par une insurrection arabe de grande ampleur (1936-1939) à la suite de laquelle les Britanniques restreignirent de façon draconienne l'immigration juive, au moment même où les juifs d'Europe, menacés par la montée de l'hitlérisme, auraient eu plus que jamais besoin d'une terre d'asile. 
La création de l'État d'Israël et l'état de guerre permanent (1948-1977) 
Chronologie (1948) Chronologie (1948) La situation prit une dimension dramatique après 1945 lorsque l'horreur du génocide perpétré contre les juifs d'Europe par les nazis apparut dans toute son ampleur et que, malgré les mesures restrictives des Britanniques, les rescapés de la Shoah affluèrent vers la Palestine. Désormais, la communauté internationale ne pouvait plus ignorer la question de la Palestine et, le 29 novembre 1947, l'Assemblée générale de l'ONU recommanda une partition de la Palestine en deux États, l'un juif, l'autre arabe, Jérusalem devant être doté d'un statut international. Ce vote, accueilli dans l'enthousiasme par les Juifs, souleva la colère des Palestiniens et des pays arabes. Le conflit israélo-arabe, qui, sous différentes formes, devait durer jusqu'à aujourd?hui, commençait. 
 
La première guerre israélo-arabe (1947-1949) 
De décembre 1947 à la mi-mai 1948, les combats mirent essentiellement aux prises l'armée juive (Haganah) et les unités palestiniennes locales ; après des débuts difficiles pour la Haganah, ce premier conflit s'acheva par une victoire israélienne, le territoire alloué à l'État juif par l'ONU étant finalement totalement contrôlé par les troupes juives. Le 14 mai 1948, veille de l'expiration du mandat britannique, le Conseil national juif proclama l'indépendance d'Israël dans les frontières qui lui avaient été reconnues par l'ONU ; David Ben Gourion en devint le premier Premier ministre. 
 
Mais, dès le départ des troupes britanniques, les combats israélo-palestiniens se transformèrent en un conflit généralisé des pays membres de la Ligue arabe contre le nouvel État : l'État hébreu fut aussitôt envahi par les armées de cinq États arabes (Égypte, Jordanie, Syrie, Liban, Iraq). Après une période initiale où les forces juives se trouvèrent dans une position critique face à cette attaque conjuguée, Israël finit par reprendre l'initiative en juillet 1948 et, au prix de lourdes pertes, à repousser les armées arabes et, même, à élargir le territoire initialement en sa possession. 
 
Cette première guerre israélo-arabe aboutit en 1949 à la fixation des frontières le long des lignes d'armistice (accords de Rhodes), et à l'exil de la majorité de la population palestinienne vers la bande de Gaza, sous administration égyptienne, ou vers la Cisjordanie, alors rattachée à la Jordanie. Dès 1950, 925?000 Arabes palestiniens réfugiés étaient inscrits sur les registres de l'UNRWA, et les États de la Ligue arabe, à défaut d'avoir vaincu Israël sur le terrain, s'engagèrent dans une stratégie de harcèlement (infiltrations de fedayins, boycottage économique…) qui allait déboucher sur une nouvelle guerre. 
 
La guerre du Sinaï (octobre-novembre 1956) 
 
Le nouvel État hébreu, en même temps qu'il mettait en place ses institutions, eut également à faire face à un nouvel afflux d'immigrants, particulièrement de juifs fuyant les pays arabes d'Afrique du Nord (Maroc, Tunisie) et d'Asie (Yémen, Iraq, Syrie, Iran). La population juive doubla en quatre ans pour atteindre 1?300?000 personnes en 1952. 
 
L'expédition de Suez (document Le Monde) Suez et Budapest : les conflits croisés de 1956 (document Le Monde) Chronologie (1956) Menacé par un isolement croissant (conclusion de pactes militaires inter-arabes, incursions égyptiennes et jordaniennes, et, finalement, blocus du golfe d'Eilat par les Égyptiens), Israël choisit d'intervenir préventivement; le 29 octobre 1956, en accord avec la Grande-Bretagne et la France qui, de leur côté, entendaient faire échec à la nationalisation du canal de Suez par Gamal Abdel Nasser, les forces armées israéliennes lançèrent une foudroyante offensive contre l'Égypte. Les forces égyptiennes ayant été paralysées par une attaque de l'aviation israélienne, la totalité de la péninsule du Sinaï fut conquise en quelques jours et Israël se trouvait sur les rives du canal de Suez lorsqu'il dut rebrousser chemin sous la pression conjointe des Soviétiques et des Américains. Condamné par le Conseil de Sécurité de l'ONU, qui exigea un cessez-le-feu immédiat, Israël arrêta les opérations militaires en pleine victoire (8 novembre) et dut retirer ses troupes de Gaza (3 mars 1957). 
 
Malgré une persistance de la tension au Proche-Orient (en 1957, Israël s'inquiéta notamment de la fourniture d'armements par les Etats-Unis à la Jordanie), le pays bénéficia ensuite pendant quelques années d'une période de calme relatif qui permit la consolidation puis la croissance de son économie. 
La guerre des Six-Jours (5-10 juin 1967) 
La guerre des Six-Jours (document Le Monde) Chronologie (1967) Bien que la décennie 1956-1965 fut relativement calme - en dépit d'incidents répétés avec les Égyptiens et des attaques de groupes palestiniens qui, en 1964, fondèrent l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) -, rien n'avait changé sur le fond et ce blocage allait conduire à un nouvel affrontement. 
 
En mai 1967, l'Égypte, après avoir exigé le départ des «casques bleus» de l'ONU stationnés depuis 1957 sur la ligne d'armistice, transféra dans le Sinaï d'importantes forces militaires et imposa le blocus du détroit de Tiran, seul accès d'Israël à son port d'Eilat sur la mer Rouge. Dans le même temps, la Jordanie, la Syrie et l'Iraq massèrent leurs troupes à l'est du Jourdain. Devant cette situation, le 5 juin, l'armée israélienne, menée par le général Moshe Dayan, déclencha une attaque préventive. Après une guerre éclair qui s'acheva par une déroute des armées arabes, Israël se retrouva en possession de la partie Est de Jérusalem, qui fut immédiatement annexée à l'État hébreu, et d'un formidable rempart stratégique : le Sinaï et la bande de Gaza (38?000 km²), les hauteurs du Golan (700 km²) et la Cisjordanie (5?800 km²), qui furent placés sous administration militaire. 
 
Tandis que les premières colonies juives s'implantaient dans certains endroits stratégiques de ces «territoires occupés», le Conseil de sécurité de l'ONU votait sa résolution 242 visant à établir une paix équitable et durable en assurant des frontières sûres et reconnues à tous les États de la région, et désormais document de référence pour toute tentative de règlement du conflit. 
La guerre de Kippour (octobre 1973) La guerre de Kippour (document Le Monde) Chronologie (1973) Les années 1969-1970 furent de nouveau marquées par une «guerre d'usure» le long du canal de Suez (duels d'artillerie, raids de l'aviation israélienne en Égypte), et la persistance de l'impasse politique poussa l'Égypte à lancer avec la Syrie et la Jordanie une brutale attaque-surprise contre l'État hébreu, le 6 octobre 1973 (Yom Kippour, jour du Grand Pardon). D'abord sur la défensive, Israël parvint finalement une nouvelle fois à repousser ses adversaires. 
La paix séparée avec l'Égypte (1979) 
Chronologie (1979) 
 
En 1974, Israël conclut deux accords de désengagement, avec l'Égypte d?abord, puis avec la Syrie. Un nouvel accord intérimaire conclu en octobre 1975 entre Israël et l'Égypte ouvrit la voie à un changement géopolitique majeur.
 
En Israël, les électionsde 1977 avaient porté au pouvoir le Likoud, bloc de partis de la droite libérale. De son côté, désireux de remplacer l'aide économique de l'URSS par celle des États-Unis, le président égyptien Anouar el-Sadate, successeur de Nasser, savait qu'il devait faire la paix avec Israël. Le Premier ministre israélien, Menahem Begin, répondit positivement à l'initiative de paix engagée par le président égyptien, qui effectua une visite surprise à Jérusalem en novembre 1977. À la suite de cette démarche historique, les négociations menées à l'initiative du président américain Jimmy Carter aboutirent aux accords de Camp David (septembre 1978), puis, en mars 1979, à la signature d'un traité de paix qui permit à l'Égypte de récupérer la totalité du Sinaï (avril 1982). La normalisation des relations avec le plus grand des États arabes constituait pour Israël un succès diplomatique et un gain stratégique indéniable mais allait replacer sur le devant de la scène régionale une question toujours non résolue : celle des Palestiniens. 
 
De l'Intifada à un processus de paix incertain Chronologie (1987) 
 
De 1948 à 1973, le conflit israélo-arabe avait été essentiellement un affrontement entre Israël et les États arabes. À partir du milieu des années 1970 et après la guerre du Kippour, ce conflit retrouva progressivement sa dimension originelle de confrontation entre juifs et Palestiniens. Deux facteurs contribuèrent à ce changement : la réémergence des Palestiniens comme force politique (création de l'OLP en 1964, développement des groupes de fedayins) et le fait qu'Israël se trouva, dans les territoires occupés depuis 1967, face à une société palestinienne qui refusait d'être dominée et s'insurgea contre l'implantation de colonies juives. 
 
Chronologie (1993) Après avoir annexé le Golan (1981), le gouvernement israélien dirigé par Menahem Begin lança une vaste offensive militaire au Liban où l'OLP avait ses bases principales (opération «Paix en Galilée», en juin 1982). Si Yasser Arafat fut chassé de Beyrouth, la guerre ne fit pas disparaître la question palestinienne. Celle-ci se posa au contraire avec une force nouvelle, à partir de décembre 1987, en Cisjordanie et à Gaza avec le déclenchement de l'Intifada, vaste mouvement de protestation contre l'occupation militaire israélienne. Dans le contexte né de la défaite irakienne dans la guerre du Golfe (1991), les États-Unis parvinrent finalement à relancer un processus de paix destiné à mettre définitivement fin au conflit israélo-arabe, y compris dans sa dimension palestinienne (conférence de Madrid, octobre 1991). Très vite, cependant, ce processus s'enlisa. Israéliens et Palestiniens engagèrent alors des négociations secrètes en Norvège qui aboutirent à la reconnaissance mutuelle entre l'OLP et Israël et à la signature d'une «déclaration de principes sur l'autonomie des territoires occupés» (septembre 1993). 
 
Obsèques d'Yitzhak Rabin Cette «révolution copernicienne» permit la constitution sur une fraction de la Cisjordanie et de la bande de Gaza d'une Autorité palestinienne élue, dotée de certains pouvoirs. Elle favorisa aussi un certain rapprochement entre Israël et les États arabes dont la manifestation la plus spectaculaire fut la conclusion d'un traité de paix avec la Jordanie (octobre 1994). Toutefois, le processus d'Oslo rencontrait de nombreuses résistances, aussi bien chez les Palestiniens (islamistes) que chez les Israéliens (colons, droite). Cette opposition prit une tournure dramatique avec l'assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin par un fanatique religieux israélien, le 4 novembre 1995, qui fragilisa un processus de paix pourtant bien engagé (accord de Taba, dit aussi Oslo II) mais que rendit plus incertain le retour aux affaires du Likoud après l'élection de Benyamin Netanyahou en mai 1996 aux dépens de Shimon Peres, et la reprise de l'implantation des colonies de peuplement dans les zones palestiniennes. Le début de l'année 1998 fut marqué par l'échec des tentatives de négociations initiées une nouvelle fois par les États-Unis pour relancer le processus de paix au Proche-Orient et par la fermeté de la politique de Benjamin Netanyahou, qui autorisa la construction de nouveaux logements destinés à abriter des colons juifs à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. 
 
Chronologie (2000) Ainsi, après une période de léthargie sous Benyamin Nétanyahou (1996-1999), la victoire d'Ehoud Barak laissait espérer que le processus de paix retrouverait un nouvel élan. Le sommet de Camp David (juillet 2000) convoqué sous la houlette des États-Unis avait pour ambition de parvenir à un règlement définitif du conflit. Son échec eut l'effet inverse : il le relança. Fin septembre, après une visite controversée d'Ariel Sharon sur l'esplanade des mosquées, une nouvelle Intifada recommençait, qui, en l'espace d'un an, allait faire plus de 1?300 morts (dont un millier de Palestiniens et 300 israéliens), gravement affecter les économies régionales et conduire à une formidable régression politique. 
 
Après l'échec de nouvelles tentatives de relance du processus de paix, entreprises en septembre 2001 entre le président de l'Autorité palestinienne et le chef de la diplomatie israélienne, à l'issue d'une année ponctuée par les attentats-suicides palestiniens et marquée par les actes terroristes perpétrés aux États-Unis, la poursuite de la violence faisait, une nouvelle fois, reculer les perspectives d'un accord durable. En mars 2002, après que les médiations internationales se furent soldées elles aussi par des échecs successifs, l'Onu adoptait, lors d'un vote historique, la résolution 1397, mentionnant pour la première fois, « la vision d'une région dans laquelle deux États, Israël et Palestine, vivent côte à côte à l'intérieur de frontières reconnues et sûres ». 
État et institutions Israël est une démocratie parlementaire, dépourvue de constitution formelle. Onze lois fondamentales ont néanmoins été adoptées depuis 1958 afin d'organiser les institutions publiques. L'organe suprême de l'État d'Israël est la Knesset, le parlement monocaméral, comprenant 120 députés. Une part importante du travail de la Knesset est la proposition et l'examen des projets de loi (95 % de ces projets sont soumis par le gouvernement). La Knesset a également une fonction de contrôle de l'action gouvernementale et peut engager une procédure de censure (situation exceptionnelle qui ne s'est produite qu'une seule fois depuis la création de l'État, en mars 1990). Les députés sont élus au suffrage universel, en principe tous les quatre ans, à la proportionnelle sur listes nationales, sans possibilité de panachage, le pays tout entier ne formant qu'une seule circonscription. 
 
Si ce système électoral présente des avantages («photographie» exacte de l'opinion publique dans toute la diversité de ses opinions), il contribue à un extrême morcellement des forces politiques qui empêche la formation de gouvernements homogènes et nécessite la constitution de coalitions, comprenant de très nombreux partis, d'options parfois difficilement compatibles. Pour corriger les effets de cette fragmentation, la désignation du Premier ministre au suffrage universel direct a été introduite en 1996. L'ambition de cette réforme était de faire naître une logique majoritaire, les électeurs devant finalement départager deux hommes, et donc choisir entre deux camps (droite/gauche). Le remède s'est avéré pire que le mal. Loin de bénéficier d'une stabilité plus grande, le Premier ministre s'est trouvé plus que jamais soumis au chantage permanent des petits partis. La preuve : ni Benyamin Nétanyahou, candidat du Likoud, élu en 1996, ni Ehoud Barak, leader du Parti travailliste, choisi en mai 1999, n'ont terminé leur mandat, tous deux ayant été lâchés par des partis-pivots de leur coalition gouvernementale. Prenant acte de cet échec, les députés sont revenus sur cette réforme en abolissant, en mars 2001, l'élection directe du Premier ministre. 
 
Le gouvernement constitue l'autorité exécutive de l'État et possède le véritable pouvoir politique. L'écrasante majorité des ministres - à commencer par le premier d'entre eux - sont des parlementaires. Le gouvernement est collectivement responsable devant la Knesset. Depuis sa création, Israël a été dirigé par onze Premiers ministres différents.
 
Le Président de l'État d'Israël a, dans le dispositif institutionnel, une place limitée. Élu pour cinq ans par la Knesset, à la majorité absolue (61 voix), il a une fonction de représentation, de ratification et de nomination. Sept présidents se sont succédé à la tête de l'État depuis 1948. 
 
Du fait de la taille réduite du pays, les autorités centrales ont un poids considérable, les collectivités locales ne jouant, au niveau municipal, qu'un rôle secondaire. Prestataires de services (entretien, santé...), les municipalités dépendent largement, pour leur budget, de dotations de l'État. Bien qu'élus directement par les résidents de la commune, les maires ne sont pas généralement des figures nationales, à l'exception de ceux dirigeant les trois grandes villes, en particulier Jérusalem. 
 
Les évolutions du système politique Israël a connu trois étapes importantes dans sa vie politique. De 1949 à 1977, le système politique a fonctionné autour d'un parti dominant «socialisant», le Mapaï, puis le parti travailliste. De 1949 à 1963, ce fut l'ère de Ben Gourion (1949-1963). Le «père fondateur» de l'État qui n'acceptait pas facilement de se voir porter la contradiction s'employa à renforcer la cohésion nationale et à faire d'Israël un acteur essentiel du jeu régional. Ses successeurs (Lévy Eshkol, Golda Meir, Yitzhak Rabin) tentèrent de préserver la suprématie du courant travailliste dans un contexte marqué par deux guerres (1967, 1973). 
 
Celle de Kippour (octobre 1973) ouvrit une grave crise de confiance dans l'opinion publique et accentua les luttes de tendances à l'intérieur du parti, en particulier entre le Premier ministre, Yitzhak Rabin, et le ministre de la Défense, Shimon Pérès. Cette décomposition interne contribua à la défaite retentissante du Mapaï en mai 1977 et au succès du Likoud. La victoire du parti de droite dirigé par Menahem Begin constitua un bouleversement majeur de la vie politique puisqu'elle permit la première véritable alternance politique. Ce succès, le Likoud le devait aux couches populaires sépharades qui se considèraient comme les laissés-pour-compte de la gauche. Cette alliance perdura mais elle ne permit pas de faire du Likoud le nouveau parti dominant. À partir de 1984, la bipartition s'installa en effet dans la vie politique, avec une gauche et une droite disposant de forces à peu près égales. Résultat : jusqu'en 1990, Likoud et Parti travailliste constituèrent ensemble un gouvernement d'union nationale.
 
La décennie suivante fut marquée par une série d'alternances gouvernementales qui ont souligné combien le système politique était devenu instable. Élu en 1992, Yitzhak Rabin imprima à la diplomatie israélienne un tournant radical en engageant avec l'ennemi d'hier, l'OLP, des négociations pour parvenir à un règlement de paix définitif. Cette décision courageuse suscita des oppositions de plus en plus vives dans certains secteurs de la société israélienne. Le 4 novembre 1995 l'irréparable se produisit : le Premier ministre fut assassiné à Tel Aviv par un juif ultra-nationaliste religieux. Le crédit de son héritier politique, Shimon Peres, disparut rapidement, emporté par la violence. En février-mars 1996, cinq attentats-suicides perpétrés par des islamistes palestiniens traumatisèrent profondément l'opinion et permirent au candidat de la droite, Benyamin Netanyahou, de remporter les élections. Toutefois, ni lui, ni son successeur de gauche, Ehoud Barak, élu en mai 1999, ne furent en mesure de se maintenir durablement au pouvoir. La raison de cette usure rapide tient en grande partie à l'extrême fragilité de leurs majorités gouvernementales, très dépendantes de petites formations, surtout de nature communautaire comme le Shas («Sépharades gardiens de la Torah») ou le parti russe «Israel ba-Aliyah». Cette fragmentation de la vie politique est à l'image d'une société israélienne fortement hétérogène. 
Société
 
État du peuple juif, Israël est ouvert par définition à tous les juifs de la diaspora qui bénéficient d'un droit naturel à y immigrer et à en devenir citoyens. Cet afflux permanent d'immigrants soulève la question du lien national. Durant les quinze premières années de sa nouvelle existence, Israël a défendu une intégration nationale par fusion qui supposait que les nouveaux arrivants abandonnent leur identité d'origine et se laissent absorber dans leur nouvelle société d'accueil. Cette logique du «melting pot» réclamait une forte intervention de l'État à travers deux instruments de socialisation, l'école et l'armée. Ces deux institutions ont ainsi puissamment contribué à nourrir un patriotisme israélien qui s'est par ailleurs renforcé avec l'usage de l'hébreu comme langue parlée, abondamment diffusée par les mass média, et l'attachement envers une territorialité spécifique (nourri par l'étude de la Bible, l'archéologie, les excursions à travers le pays). 
 
Si un fort sentiment d'appartenance national a vu le jour, la société israélienne reste toutefois fortement divisée selon trois lignes de fracture. 
 
Les Arabes israéliens Comme tous les États du Proche-Orient, l'État d'Israël est fondé sur la reconnaissance des appartenances communautaires. Par conséquent, juifs, Arabes et Druzes (secte hétérodoxe de l'islam) sont officiellement considérés comme des groupes ethniques différents. Le million d'Arabes et de Druzes possèdent de plein droit la citoyenneté israélienne mais leur statut de minoritaires dans un État juif les place souvent dans une situation très délicate. Soumis jusqu'en 1966 à une administration militaire qui restreignait sévèrement leurs libertés civiles, les Arabes d'Israël virent leurs terres expropriées et remises à des localités juives et des kibboutzim. Quant aux ressources qui leur étaient allouées, elles étaient notoirement plus réduites que celles destinées aux juifs (subventions publiques, dotations budgétaires aux conseils locaux et municipaux...). 
 
Bien que la situation objective des Arabes d'Israël se soit améliorée depuis les années 1970 (et soit, dans l'ensemble, souvent meilleure que celles de beaucoup de leurs frères vivant dans des pays arabes), leur intégration dans un État juif dont ils ne partagent ni les valeurs, ni les symboles demeure nécessairement problématique. Leur présence dans les sphères étatiques est faible : ils sont largement absents de la haute fonction publique et il fallut attendre 2001 pour voir un Arabe nommé ministre. Situés à la périphérie politique de la société israélienne, les Arabes apportent majoritairement leurs suffrages à des partis non sionistes (Parti communiste, Parti démocratique arabe) et poursuivent une stratégie de consolidation communautaire qui passe de façon croissante par l'islam. De plus, tout en exigeant l'égalité de traitement avec leurs concitoyens juifs, ils ont réaffirmé, au contact des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza, leur identité palestinienne. 
 
Socialement, les Arabes d'Israël ont connu un changement profond depuis 1949. À cette époque, ils étaient 75 % à être employés dans l'agriculture, aujourd?hui ils ne sont plus que 10 %. La majorité des actifs arabes se retrouvent, pour moitié, dans le secteur industriel et la construction, et pour moitié dans les activités de service (commerce, transport). Cette modernisation accélérée de la structure professionnelle s'est accompagnée d'une urbanisation intense : alors que trois quarts des Arabes vivaient, avant 1948, dans des villages, la même proportion vit aujourd?hui dans des villes. Sur le plan éducatif, les Arabes sont convenablement scolarisés, dans l'enseignement secondaire, mais dans le supérieur ils n'étaient à la fin des années 1990 que 7?000 (sur 110?000 étudiants). Cette présence marginale n'est pas due uniquement à un niveau scolaire inférieur (maîtrise imparfaite de l'hébreu, programmes scolaires différents) mais aussi à la difficulté pour eux de trouver un emploi correspondant à leurs qualifications au sein d'une économie juive dans laquelle ils pénètrent difficilement. 
 
Ashkénazes et Sépharades Autant les différences entre juifs et Arabes sont officiellement reconnues, autant celles entre juifs sont récusées par un État fondé sur le postulat de l'unité du peuple juif. Pourtant, les conditions mêmes dans lesquelles la société israélienne s'est étoffée humainement (par immigrations successives) ont perpétué un clivage entre Ashkénazes (juifs originaires d'Europe et d'Amérique) et Sépharades (juifs originaires des pays d'islam). La population juive est aujourd?hui à peu près également distribuée entre ces deux groupes ethniques. Bien que les Sépharades aient connu une ascension sociale certaine depuis les années 1970 (forte pour les Irakiens, faible pour les Marocains) et que les phénomènes de convergence (dans les modes de vie, les pratiques familiales, etc.) soient réels, la constitution d'une nation juive-israélienne par amalgame des immigrants est encore lointaine. La persistance d'un écart ethnique important dans les domaines éducatif et professionnel au détriment des Sépharades atteste que la stratégie de fusion dans un creuset commun n'est pas totalement parvenue à ses fins. Ainsi les élèves d'origine orientale sont très présents dans les écoles professionnelles alors que leurs condisciples ashkénazes se dirigent majoritairement vers l'enseignement général. À l'université, les Sépharades ont cinq fois moins de chance d'obtenir un diplôme que les Ashkénazes. Au niveau économique, les juifs des pays d'Islam sont nombreux parmi les ouvriers et les petits artisans alors que les juifs d'Occident forment les gros bataillons des classes moyennes et dominent l'élite économique, universitaire et médiatique. Le mécontentement du «second Israël» par rapport à cette situation s'est traduit politiquement par le soutien accordé au Likoud à partir de 1977, mais aussi par la mobilisation inédite de la «sépharadité» à travers le parti Shass. Ce dernier associe appel à une pratique rigoriste du judaïsme et valorisation de la spécificité ethno-culturelle des juifs des pays d'Islam. En offrant un ensemble de services (jardins d'enfants, écoles primaires...), le Shass est parvenu à renforcer sa base sociale et à s'imposer de plus en plus comme le porte-parole de l'«Israël sépharade» économiquement défavorisé et culturellement marginalisé. 
 
Ce processus de communautarisation n'est d'ailleurs pas limité au monde sépharade. L'entrée à la Knesset en 1996, sous le label «Israel ba-Aliya», de sept députés élus par les nouveaux immigrants des pays de l'ex-URSS atteste de la constitution d'une forte communauté russophone. Un certain nombre de facteurs entretiennent la tendance à la mobilisation communautaire : le poids démographique, le profil identitaire (forte déjudaïsation allant de pair avec la valorisation d'une identité culturelle russe), l'organisation interne très complète (associations, presse et télévision en russe),... 
 
Ce processus de pluralisation, ou de communautarisation, de la société israélienne s'opère par ailleurs dans un contexte d'intensification de l'opposition entre religieux et laïcs. 
 
Religieux et laïcs 
 
Dès le départ, Israël s'est défini comme un État juif, c?est-à-dire un État devant assurer, à travers ses institutions, un projet de vie collective juive. Même si le contenu précis de cette identité nationale n'a jamais été clairement déterminé, le caractère juif de l'État impliquait que le droit de la famille et l'espace public étaient partiellement régis par une législation d'origine religieuse. D'où l'adoption d'une série de lois réglementant le respect du shabbat, la distribution de nourriture kascher dans les cantines publiques, les restrictions à l'élevage et à la commercialisation de porc, etc. et attribuant la gestion des mariages et divorces aux seules autorités religieuses.
 
Ce statu quo où l'État concède certaines compétences à la sphère religieuse s'est maintenu jusqu'à aujourd?hui malgré de nombreuses crises. Il est toutefois malmené dans un contexte où la réaffirmation religieuse dans certains secteurs va de pair avec l'approfondissement de la sécularisation de la société. 
 
Le pôle religieux, qui regroupe environ un quart de la population juive, est composé de deux courants, ultra-orthodoxe et sioniste-religieux. Bien que séparés par d'importantes controverses théologiques quant à la signification religieuse à accorder à l'État d'Israël, ces deux groupes défendent une même interprétation rigoriste du judaïsme et sont favorables à une présence plus grande de la religion dans la vie publique. Le rôle pivot que les partis religieux remplissent dans les différentes coalitions gouvernementales leur donne de plus un moyen de pression idéal pour faire avancer leurs revendications. Toutefois, l'activisme des groupes religieux se heurte à l'opposition d'autres secteurs de la société israélienne qui défendent une laïcité plus ou moins affirmée (allant pour certains jusqu'à la séparation de la synagogue et de l'État). Les logiques individualistes tant dans les domaines économique (encouragement à la libre entreprise), matériel (société de consommation) que juridique (protection croissante de droits individuels) s'affirment par ailleurs de plus en plus fortement. La poursuite de la dynamique de sécularisation renforce le groupe des «laïcs radicaux» pour lesquels Israël doit entrer dans une logique post-nationale, c?est-à-dire devenir une société libérale, neutre d'un point de vue religieux et intégrée à la modernité avancée. 
 
Ces deux mouvements contradictoires qui amènent les uns à prôner un État selon la Torah et les autres à se faire les avocats d'un Israël post-sioniste ont tendance à structurer le débat à l'intérieur de la société israélienne, même s'il existe entre les deux pôles un vaste conglomérat «centriste» de personnes attachées à la nature hybride de l'État d'Israël comme État juif et démocratique. 
 
Le jeu complexe de ces différents clivages - juifs/Arabes, Sépharades/Ashkénazes, religieux/laïcs - définira les contours de l'État d'Israël de demain mais ses effets seront largement tributaires de la situation géopolitique d'Israël au sein du Proche et du Moyen-Orient. 
 
Éducation et santé L'ensemble de la population bénéficie de services sociaux très développés, pour l'essentiel liés aux secteurs public (État et autorités locales) et parapublic (avec la puissante confédération syndicale de la Histadrouth). Les dépenses d'éducation et de santé absorbent respectivement 9 % et 8 % du PNB. La scolarité, obligatoire de 6 à 16 ans, est gratuite jusqu'à 18 ans. Près de 80 % des jeunes suivent le cycle complet des enseignements primaire (6 ans), intermédiaire (3 ans) et secondaire (3 ans). Le Technion, institut technologique d'Israël, et l'Université hébraïque de Jérusalem ont été complétés depuis l'indépendance par l'Institut scientifique Weizmann et les universités de Tel-Aviv-Jaffa, Haïfa, Ramat Gan et Beersheba. Ces établissements, qui développent parallèlement une intense activité de recherche et développement, accueillent 65?000 étudiants. Les écoles supérieures de spécialités diverses en reçoivent 33?000. 
 
Partant d'un acquis déjà important en 1948, Israël a mis en place un des réseaux sanitaires les plus denses du monde. La recherche médicale jouit d'une renommée internationale. Les grands problèmes de santé sont ceux d'un pays développé: importance des maladies cardiaques et des cancers, poids croissant de la population âgée, risques liés à la dégradation de l'environnement. 
Culture et civilisation Israël a élaboré une culture originale, synthèse de l'héritage biblique et talmudique et des traditions variées de la Diaspora.
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